Compendium
CaD Cinéma
La prise de son cinéma
LA PERCHE - Comment faire ?
[TEXTE - PICS // 25 minutes] [25 minutes]
Définition
La perche est un déport conçu pour amener le micro au plus proche des sources sonores, au-dessus du cadre de la caméra, qui est toujours plus large que haut.
Jusqu’à l’époque de la Nouvelle Vague (voir plus la note plus bas), la perche était un lourd engin sur pied. Les tournages de films avaient lieu majoritairement en studio, les déplacements des acteurs étaient ainsi limités à l’ampleur des surfaces décorée et des artifices visuels, un peu comme au théâtre.
La volonté de tournage en extérieur, en milieu naturel et conditions réelles a eu pour effet sur le plan technique un allègement considérable du matériel, pour l’enregistrement sonore autant que pour la prise de vue. Les perches sont devenues de simples “bâtons” télescopiques tenus à la main et déplacés directement par le corp du perchman.
Le perchman utilise au moins trois tailles de perche en tournage :
- Une petite (de 60 à 240 cm) : pour les décors exigus.
- Une moyenne (de 90 à 400 cm) : pour la majorité des cas de figure.
- Une grande (de 120 à 600 cm) : pour des plans larges ou en longue focale en extérieur.
NOTE : L'expression "La Nouvelle Vague" est communément utilisée pour décrire la nouvelle génération de cinéastes français qui a émergé à la fin des années 1950. "La Nouvelle Vague" sera une révolution du cinéma et des règles qui avaient peu à peu été établies durant les 5O premières années de l'histoire du cinéma. De jeunes cinéastes vont alors permettre à un nouveau cinéma d'émerger : le cinéma d´auteur. Les piliers de la Nouvelle Vague sont : François Truffaut, Jean-Luc Godard, Claude Chabrol, Eric Rohmer, Jacques Rivette et Alain Resnais (cf. le ciné-club de SdS.)
La prise en main
La perche se tient presque toujours dans l’alignement des épaules, perpendiculairement au visage.
Pour le perchman, il y a donc un bras “avant” et un bras “arrière”.
- le bras “avant” supporte l’essentiel du poids
c’est pourquoi la plupart des perchman tiennent ce bras-là quasi tendu (la fatigue est moindre)
- le bras “arrière” fait contrepoids en bout de perche et sert à diriger les mouvements.
- la main “avant” soutient la perche
elle reste ouverte chez la plupart des perchmans. En restant ouverte elle est disponible pour une large amplitude de rotation à la perche
- la main “arrière” dirige les mouvements
y compris un vissage et dévissage pour des rotations du micro, elle doit rester souple et supporter le moins de poid possible..
Les déplacements du perchman
Une des premières règles est de limiter son déplacement au minimum. Pour cela, le perchman doit d’abord posséder une grande amplitude de mouvement sans avoir à bouger les pieds.
Le juste écartement des bras est essentiel,
- avec des bras trop écartés, il devient difficile de faire varier la profondeur
- avec des bras très resserrés, l’amplitude de mouvement est beaucoup plus importante (environ 1m de déplacement sans bouger les pieds) mais la perche paraît aussi beaucoup plus lourde.
Le bon écartement est à déterminer en fonction des plans, selon le type de mouvement à réaliser et la durée de la prise.
Lorsque les déplacements à effectuer sont importants, le perchman déplace ses pieds en se synchroniser avec le ou les comédiens. Il y a ainsi moins de risque d’entendre les pas du perchman dans l’enregistrement s’ils sont masqués par ceux du comédien, situés plus près du micro et donc plus “bruyants”.
C’est finalement la même chose que pour l’image lors d’un mouvement de caméra : Le cadreur s’arrange fait coïncider son travelling ou panoramique avec le déplacement d’un individu ou d’un objet. En projection,
le regard se focalisera sur le mouvement du sujet et on oubliera le mouvement de caméra.
Parfois le perchman est obligé de se déplacer en décalage par rapport aux comédiens :
- pour aller chercher un nouveau personnage
- pour faire des allers-retours entre deux sources assez éloignées
Pour rester discret, le perchman :
- utilise des chaussures souples (type baskets)
- se déplace en assouplissant ses pas, sans trop reposer les talons dont les contacts lourds avec le sol risquent de générer des impacts dont les fréquences basses peuvent se propager à travers la perche jusqu’au micro
Malgré cela, le perchman doit être capable de se déplacer rapidement, et parfois dans des espaces très accidentés ou encombrés, au milieu des projecteurs, des éléments de décor et des positions interdites par les reflets et les ombres.
Le bon placement du micro
1. Enjeu n°1
Lors d’un déplacement, la contrainte majeure est de conserver le micro à une hauteur constante, car celui-ci doit toujours rester placé au-dessus du cadre, tout en se déplaçant dans la largeur et dans la profondeur.
Par exemple, si l’on doit passer d’un personnage situé au premier plan (donc en gros plan), à un personnage dans le fond du cadre, il faut relever un peu le micro tout en avançant rapidement.
Enjeu n°2
La seconde grande contrainte est d’essayer de “viser juste”, c’est-à-dire de savoir sentir à plusieurs mètres de distance et parfois bien au-dessus de sa cible si le micro est parfaitement centré sur son objectif.
Avec un comédien, il faut viser un peu devant la bouche, en évitant de dépasser la verticale du front, sous peine d’un masquage physique du son par la tête.
Une partie de la difficulté vient du fait que l’on place quasiment toujours la perche au-dessus du visage du comédien et pas en dessous, alors que l’orientation de la bouche est au mieux horizontale, mais plus généralement vers le bas.
Il n’est possible de percher par le dessous du cadre que lorsque la valeur de plan est suffisamment serrée pour que la distance micro-bouche soit à peu près équivalente à celle pour un placement par le dessus.
La gestion des ombres, reflets, et focales
Enfin, le maniement de la perche, les déplacements physique et le placement du micro doivent s’adapter à d’autres éléments pour le perchman.
1. les sources lumineuses
La perche peut provoquer des ombres et le perchman doit savoir faire une lecture avertie des tous les pièges que dans le décor contient en la matière et chercher tous les aménagements possibles
2. la gestion des reflets
toute surface réfléchissante peut trahir la présence de l’équipe de tournage autour des personnages filmés (miroirs, vitres, tableaux, sols brillants, surfaces métalliques, carrosseries de véhicules, etc…)
les éviter au maximum, par exemple, en retirant les vitres des tableaux, entrouvrir les fenêtres, appliquer un spray mat sur des matières et des zones trop brillantes.
La solution est aussi parfois d’adopter une position fixe discernable dans le cadre en s’arrêtant sur l’image mais négligeable pour le spectateur sur la durée du plan, car ce sont essentiellement les éléments mobiles qui attirent l’oeil dans une réflexion ou en direct.
La lisibilité par rapport au fond est également importante. Un vêtement ou un équipement noir mat se fait moins remarquer en attirant moins la lumière.
La lisibilité par rapport au fond est également importante. Un vêtement ou un équipement noir mat se fait moins remarquer en attirant moins la lumière.
3. la connaissance des focales
le perchman doit comprendre le cadre, percevoir l'espace de jeu, il place le micro en évaluant mentalement la zone à éviter pour ne pas entrer dans le champ de la caméra
le perchman doit savoir presque aussi bien qu’un cadreur quelle valeur de plan correspond à une focale donnée. Il n’est pas indispensable de connaître par coeur les valeurs de focales, mais d’arriver à sentir le cadre autour du sujet lorsqu’il s’agit d’un gros plan, d’un plan poitrine, d’un plan américain, ou d’un plan en pieds.
Pour les plans très large, il vaut mieux utiliser des repères dans le décor en communiquant directement avec le cadreur.
Pour aller plus loin :
La Chaîne du son au cinéma et à la télévision de Lucien Balibar
Paru le 06/02/2019
Éditeur Dunod
Collection Audio-Vidéo
Format 17cm x 24cm
Nombre de pages 320