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Analyse des œuvres #2

 

Références à partir des travaux des étudiants qui ont travaillé lors de cette semaine de création sur un texte de Antonin Artaud à propos du peintre Balthus et de l’analyse de quelques-unes de ses œuvres, notamment celles qui ont donné lieu à sa première exposition personnelle.

Certains aspects de l’amitié de l’écrivain et de l’artiste ont retenu l’attention.
Mais c’est surtout le regard que porte Balthus sur la réalité, et le commentaire qu’en fait Artaud qui a nourri les créations.
Suite à la présentation des travaux des étudiants, a été particulièrement retenu un aspect qui est celui du regard et du point de vue.

  • Regard qui se déplace
  • regard qui dévoile, révèle
  • regard qui montre ou cache
  • regard intrusif,
  • regard effrayé,
  • regard général,
  • regard particulier,
  • regard moral…
  • regard de l’artiste
  • regard du spectateur.

 

S’agit-il d’apprendre à voir, à comprendre, à apercevoir, à transgresser… ? 

L’histoire de l’art, du cinéma, et de tous arts visuels, est traversée par cette question, et a donné lieu à de nombreuses œuvres, y compris à des inventions techniques permettant d’ouvrir ou transformer le champ de vision, le point de vue. Et dont l’objectif varie en fonction des époques, ou des œuvres.
Mais la littérature et la poésie ont aussi été traversées par cette problématique.
Regard réel, organique, ou regard allégorique, abstrait, voici quelques œuvres qui relèvent d’histoires de l’œil.

 


 

Œuvres et artistes de référence :

 

#1 Peeping Tom (Le voyeur - 1960) film de Michael Powell

Mark Lewis est un jeune homme énigmatique et solitaire, passionné d'image jusqu'à l'obsession. La caméra toujours à portée de main, Mark Lewis s'emploie en réalité à une démarche bien plus morbide et assassine : il traque la peur de la mort sur le visage des jeunes femmes qu'il filme.

critique/analyse du film
http://www.lebleudumiroir.fr/critique-le-voyeur-michael-powell/ 

LE VOYEUR
Mark Lewis est un jeune homme mystérieux, perturbé par une enfance difficile avec un père scientifique qui traquait ses moindres angoisses. Il est aujourd’hui caméraman et, une fois la nuit tombée, traque des jeunes femmes afin de capturer l'expression de la peur sur le visage alors qu’il s’apprête à les tuer.
 

PLAN MEURTRIER.

Dans la filmographie de Michael Powell, Le Voyeur – Peeping Tom dans sa version originale – marque forcément une rupture, et ce à plusieurs titres.  Durant une quinzaine d’années, entre 1943 et 1958, Powell collabore avec Emeric Pressburger (qu’il rencontra avant la guerre) et les deux vont donner naissance à des chefs d’œuvre du cinéma britannique – Colonel Blimp ou encore Les Chaussons Rouges – et mondial. En 1959, le natif du Kent se sépare définitivement de son compère et travaille sur Le Voyeur qui est sa première incursion dans le genre du thriller et même du film de serial killer, lui l’adepte de films lyriques et shakespeariens – même si Le Narcisse Noir est un petit dissonant dans cet ensemble. Mais surtout, Le Voyeur va forcer Powell à se retirer du cinéma britannique, les critiques trouvant le film trop violent et malsain et les studios refusant de travailler avec lui.  Powell ne sera plus crédité que de trois films en quinze ans et devra attendre une dizaine d’années avant que lui et son œuvre ne soient pleinement réhabilités.

En regardant Le Voyeur avec l’œil d’un spectateur forcément gavé d’œuvre mettant en scène des tueurs plus psychopathes les uns que les autres – en plus de subir une réalité qui dépasse parfois la fiction – on comprend tout de suite pourquoi ce film est cité comme une référence en la matière. Pourtant Powell fait l’économie d’effets sanguinolents ou de monologues sur la folie du tueur ; ici, tout est dans l’ambiance feutrée d’une chambre, d’un studio de cinéma ou d’une pièce de projection. Le danger n’apparaît pas évident quand on voit Mark Lewis essayer de communiquer maladroitement avec sa voisine ou ses collègues, il perce petit à petit au fil de la discussion ou suivant les gestes et les regards de Lewis. La tension devient ainsi palpable et Powell s’amuse à la faire durer plus ou moins longtemps pour empêcher le spectateur de prévoir la suite des événements : le coup peut tomber n’importe quand ou être remis à une prochaine occasion. Il peut s’exprimer par les mots ou un regard de biais ou surgir via un film projeté.
Car la grande trouvaille de Powell en terme de mise en scène est de directement nous faire voir les meurtres, en vue subjective via la caméra de Lewis qui développe les bandes par la suite et les regarde dans son appartement. Dès la première séquence du film, le spectateur est piégé par le Britannique qui le tient ainsi à sa merci. Durant une centaine de minutes, il ne respirera pas et sera ballotté dans la psyché de ce jeune homme psychotique. La performance de Karlheinz Böhm renforce le sentiment étrange qui lie le spectateur à Lewis, entre petite empathie – son enfance a été problématique à souhait – et rejet profond mais impuissant pour ce meurtrier qui tente de capter le regard terrifié de ces victimes tout en leur montrant via un miroir installé sur la caméra. Jamais la victime, le tueur et le spectateur n’ont été aussi liés face à la mort – à part dans les films d’Alfred Hitchcock comme Psycho ; et c’est ce qui rend Le Voyeur si malsain et viscéral. De plus, il est difficile de trouver une bouée de sauvetage, le film étant centré exclusivement sur Lewis et les rares interactions qu’il entretient avec celles qui l’hébergent – à savoir Helen et sa mère aveugle – sont quasiment toujours filmés avec un malaise palpable, dû à la fois à la gaucherie de Lewis et à ce que l’on sait de ses pulsions. Le piège psychologique fomenté par le réalisateur anglais fonctionne donc parfaitement.
Clairement l’oeuvre de Powell  ne laisse pas indifférent. Sorti au carrefour des années 50 et 60, dans une société britannique où rien ne doit dépasser, le film avait tout pour provoquer le scandale. Socialement, il permet de montrer des maux profonds comme le voyeurisme et les violences faites aux femmes sous un vernis qui se veut impeccable ; cinématographiquement, Powell secoue le spectateur et le rend complice des agissements de Lewis, pris au piège de son attrait pour les films morbides. Le final est loin de soulager la conscience du spectateur, condamné à ressasser les meurtres au-delà du visionnage, là où la culpabilité de Lewis s’arrête au bout de la pellicule.
Aujourd’hui Le Voyeur est considéré comme un des chefs-d'œuvre du cinéma. À juste titre, mais il ne faut pas occulter le fait qu’il s’agit véritablement d’une œuvre sans concession et violente qui ne laisse pas indifférent et qui peut vraiment choquer et heurter. Vous voilà prévenu si jamais l’aventure vous tente.


 


 

#2 Le voyeur, roman de Alain Robbe-Grillet (1955) 

alain Robbe-Grillet
le voyeur / Les éditions de minuit

 

Alain Robbe-Grillet
Le Voyeur
Prix des Critiques 1955
1955
256 pages
ISBN : 9782707302434

L’histoire est celle d’un voyageur de commerce, qui arrive dans une île où, semble-t-il, il est né et a gardé quelques amis d’enfance, pour tenter de placer sa marchandise. Toute la journée, sur une bicyclette de location, il parcourt l’île dans tous les sens. Pendant cette même journée, une toute jeune fille, connue pour son goût du flirt et des fugues, sera assassinée. Violée, peut-être ?

Le récit est mené par Mathias, le voyageur-voyeur, qui accumule les détails, compte les allées et venues, les siennes et celles des autres, mesure les temps, vérifie sans cesse l’état de ses ventes, justifie chacune des secondes qu’il a passées sur l’île avec une minutie si excessive que le lecteur le plus distrait doit se rendre compte que le texte tout entier, phrase après phrase, est là pour masquer, ou combler, un vide dans cet emploi du temps. Masquer, mais aussi désigner.
Car la narration du Voyeur est tout entière fondée sur cette intuition que la description est, dans une œuvre littéraire, faite pour égarer. Pour empêcher de « voir ». 

Liens : Le Voyeur

 

Critique analyse du livre

« Lorsqu'en 1955 Alain Robbe-Grillet obtient, pour son deuxième roman publié, Le Voyeur, le prix des Critiques, le scandale fait rage. Si quelques lecteurs « modernes », comme Maurice Blanchot ou Roland Barthes, parlent avec intelligence et admiration du livre, la critique officielle se déchaîne. Émile Henriot, qui tient le feuilleton du Monde, traite l'auteur de malade mental et le menace de la chambre correctionnelle. Il reviendra plus tard sur son erreur, mais Gabriel Marcel. philosophe catholique et membre influent du jury, démissionne. Obscénité, ou illisibilité, ou les deux. Les jugements s’arrêtaient là, qui, aujourd’hui, nous étonnent.
L’argument, à nette connotation policière, du roman est assez clair : un voyageur de commerce, représentant en montres, arrive dans un île où, semble-t-il, il est né et a gardé quelques amis d’enfance, pour tenter de placer sa marchandise. Toute la journée, sur une bicyclette de location, il parcourt l’île dans tous les sens. Pendant cette même journée, une toute jeune fille, connue pour son goût du flirt et des fugues, sera assassinée. Violée, peut-être ? Le récit est mené par Mathias, le voyageur-voyeur, qui accumule les détails, compte les allées et venues, les siennes et celles des autres, mesure les temps, vérifie sans cesse l’état de ses ventes, justifie chacune des secondes qu’il a passées sur l’île avec une minutie si excessive que le lecteur le plus distrait doit se rendre compte que le texte tout entier, phrase après phrase, est là pour masquer, ou combler, un vide dans cet emploi du temps. Masquer, mais aussi désigner.
Car la narration du Voyeur est tout entière fondée sur cette intuition que la description est, dans une œuvre littéraire, faite pour égarer. pour empêcher de « voir ». Le XIXe siècle balzacien a vécu sur l’idée que l’écriture pouvait « rendre compte de la réalité », la faire « saisir » par le lecteur. Pour Robbe-Grillet, au contraire, fidèle disciple de Flaubert, l’écriture ne dit pas la « vérité », elle ne dit que l’écriture. Si énigme il y a, le roman ne peut que dire cette énigme, non la résoudre. Même si des signes la parsèment (ici, par exemple, les huit, celui que forme l’anneau rouillé qui va de droite et de gauche sur la pierre du quai d’embarquement, les ficelles nouées, les roues d’une bicyclette, qui tournent encore après que la jeune fille est tombée [a été précipitée ?] du haut de la falaise, etc.), ce sont les indices d’une duperie profonde : celle de la littérature, qui ne peut que rendre compte d’un soupçon sur la réalité, la vérité, jamais d’une certitude.
Barthes, à propos du Voyeur. parla de « littérature du regard ». Certes, mais l’objet que le romancier-voyeur regarde, décrit, ne va pas au-delà de lui-même. Au lecteur de s’arranger avec ce que le romancier lui donne : qu’il ne compte pas sur l’écrivain pour lui fournir des certitudes, ou le rassurer. D’où l’étrangeté, à son époque, de ce roman, et du raz de marée moral qu’il souleva chez les habitués du roman traditionnel, à histoire, avec un début et une fin. Le Voyeur avait bien un début et une fin, et une durée, mais qui n’étaient ni claires ni explicatives. Le roman et, selon son auteur, tout vrai roman, obéissait à une logique autre, la logique de l’écriture. Rendue plus étrange et étrangère encore qu’elle prenait le prétexte, et l’allure, d’un fait divers. Une logique qui allait jusqu’au bout de la critique de Sartre (« Dieu n’est pas un artiste. M. Mauriac non plus »), qui interdit au romancier d’en savoir davantage, et plus tôt, que ses personnages, sous peine de leur dénier toute liberté. Mathias est l’un des personnages les plus libres de l’histoire du roman. »
Jean-Jacques Brochier,
Dictionnaire des œuvres (Laffont, « Bouquins », 1994).
 

 


 

#3 Histoire de l’œil, roman de Georges Bataille (1928)

hitoire de l oeil

 

GEORGES BATAILLE
Histoire de l'œil
Collection L'Imaginaire (n° 291), Gallimard
Parution : 04-03-1993

« À d'autres l'univers paraît honnête. Il semble honnête aux honnêtes gens parce qu'ils ont des yeux châtrés. C'est pourquoi ils craignent l'obscénité. Ils n'éprouvent aucune angoisse s'ils entendent le cri du coq ou s'ils découvrent le ciel étoilé. En général, on goûte les "plaisirs de la chair" à la condition qu'ils soient fades.
Mais, dès lors, il n'était plus de doute : je n'aimais pas ce qu'on nomme "les plaisirs de la chair", en effet parce qu'ils sont fades. J'aimais ce que l'on tient pour "sale". Je n'étais nullement satisfait, au contraire, par la débauche habituelle, parce qu'elle salit seulement la débauche et, de toute façon, laisse intacte une essence élevée et parfaitement pure. La débauche que je connais souille non seulement mon corps et mes pensées mais tout ce que j'imagine devant elle et surtout l'univers étoilé… »

Ce court roman de Georges Bataille décrit les expériences sexuelles de deux adolescents et leur perversité croissante. Il a d’abord été édité clandestinement et sous pseudonyme.

« À d'autres l'univers paraît honnête. Il semble honnête aux honnêtes gens parce qu'ils ont des yeux châtrés. C'est pourquoi ils craignent l'obscénité. »

Ce texte a par ailleurs donné lieu à des illustrations, graphiques, picturales.
Qui sont aussi les interprétations des artistes de cette histoire singulière qui provoqua du trouble.

wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l'œil  

Illustration par Hans Bellmer :

Illustration par André Masson : 
 

 


 

#4 La conscience, poème de Victor Hugo (1885)

Chez Hugo, le regard s'apparente à la morale. « L’œil était dans la tombe et regardait Caïn. »

 

La conscience

Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes,
Echevelé, livide au milieu des tempêtes,
Caïn se fut enfui de devant Jéhovah,
Comme le soir tombait, l’homme sombre arriva
Au bas d’une montagne en une grande plaine ;
Sa femme fatiguée et ses fils hors d’haleine
Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. »
Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts.
Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres,
Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres,
Et qui le regardait dans l’ombre fixement.
« Je suis trop près », dit-il avec un tremblement.
Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse,
Et se remit à fuir sinistre dans l’espace.
Il marcha trente jours, il marcha trente nuits.
Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits,
Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve,
Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève
Des mers dans le pays qui fut depuis Assur.
« Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr.
Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. »
Et, comme il s’asseyait, il vit dans les cieux mornes
L’oeil à la même place au fond de l’horizon.
Alors il tressaillit en proie au noir frisson.
« Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche,
Tous ses fils regardaient trembler l’aïeul farouche.
Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont
Sous des tentes de poil dans le désert profond :
« Etends de ce côté la toile de la tente. »
Et l’on développa la muraille flottante ;
Et, quand on l’eut fixée avec des poids de plomb :
« Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l’enfant blond,
La fille de ses Fils, douce comme l’aurore ;
Et Caïn répondit : « je vois cet oeil encore ! »
Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs
Soufflant dans des clairons et frappant des tambours,
Cria : « je saurai bien construire une barrière. »
Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière.
Et Caïn dit « Cet oeil me regarde toujours ! »
Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours
Si terrible, que rien ne puisse approcher d’elle.
Bâtissons une ville avec sa citadelle,
Bâtissons une ville, et nous la fermerons. »
Alors Tubalcaïn, père des forgerons,
Construisit une ville énorme et surhumaine.
Pendant qu’il travaillait, ses frères, dans la plaine,
Chassaient les fils d’Enos et les enfants de Seth ;
Et l’on crevait les yeux à quiconque passait ;
Et, le soir, on lançait des flèches aux étoiles.
Le granit remplaça la tente aux murs de toiles,
On lia chaque bloc avec des noeuds de fer,
Et la ville semblait une ville d’enfer ;
L’ombre des tours faisait la nuit dans les campagnes ;
Ils donnèrent aux murs l’épaisseur des montagnes ;
Sur la porte on grava : « Défense à Dieu d’entrer. »
Quand ils eurent fini de clore et de murer,
On mit l’aïeul au centre en une tour de pierre ;
Et lui restait lugubre et hagard. « Ô mon père !
L’oeil a-t-il disparu ? » dit en tremblant Tsilla.
Et Caïn répondit :  » Non, il est toujours là. »
Alors il dit: « je veux habiter sous la terre
Comme dans son sépulcre un homme solitaire ;
Rien ne me verra plus, je ne verrai plus rien. »
On fit donc une fosse, et Caïn dit « C’est bien ! »
Puis il descendit seul sous cette voûte sombre.
Quand il se fut assis sur sa chaise dans l’ombre
Et qu’on eut sur son front fermé le souterrain,
L'œil était dans la tombe et regardait Caïn.
 
Victor Hugo
 
Chez Hugo, le regard s'apparente à la morale. « L’œil était dans la tombe et regardait Caïn. »  La conscience  Lorsque avec ses enfants vêtus de peaux de bêtes, Echevelé, livide au milieu des tempêtes, Caïn se fut enfui de devant Jéhovah, Comme le soir tombait, l’homme sombre arriva Au bas d’une montagne en une grande plaine ; Sa femme fatiguée et ses fils hors d’haleine Lui dirent : « Couchons-nous sur la terre, et dormons. » Caïn, ne dormant pas, songeait au pied des monts. Ayant levé la tête, au fond des cieux funèbres, Il vit un oeil, tout grand ouvert dans les ténèbres, Et qui le regardait dans l’ombre fixement. « Je suis trop près », dit-il avec un tremblement. Il réveilla ses fils dormant, sa femme lasse, Et se remit à fuir sinistre dans l’espace. Il marcha trente jours, il marcha trente nuits. Il allait, muet, pâle et frémissant aux bruits, Furtif, sans regarder derrière lui, sans trêve, Sans repos, sans sommeil; il atteignit la grève Des mers dans le pays qui fut depuis Assur. « Arrêtons-nous, dit-il, car cet asile est sûr. Restons-y. Nous avons du monde atteint les bornes. » Et, comme il s’asseyait, il vit dans les cieux mornes L’oeil à la même place au fond de l’horizon. Alors il tressaillit en proie au noir frisson. « Cachez-moi ! » cria-t-il; et, le doigt sur la bouche, Tous ses fils regardaient trembler l’aïeul farouche. Caïn dit à Jabel, père de ceux qui vont Sous des tentes de poil dans le désert profond : « Etends de ce côté la toile de la tente. » Et l’on développa la muraille flottante ; Et, quand on l’eut fixée avec des poids de plomb : « Vous ne voyez plus rien ? » dit Tsilla, l’enfant blond, La fille de ses Fils, douce comme l’aurore ; Et Caïn répondit : « je vois cet oeil encore ! » Jubal, père de ceux qui passent dans les bourgs Soufflant dans des clairons et frappant des tambours, Cria : « je saurai bien construire une barrière. » Il fit un mur de bronze et mit Caïn derrière. Et Caïn dit « Cet oeil me regarde toujours ! » Hénoch dit : « Il faut faire une enceinte de tours Si terrible, que
LA CONSCIENCE, VERS 1885
La Légende des Siècles, I, D’Eve à Jésus, II, La Conscience
François-Nicolas Chifflart

 

 

 

Abel et Caïn  ?

C’est le premier meurtre, Cain assassine son frère par jalousie. Interrogation à Dieu.
Exil et errance de Caïn.
Texte biblique : https://mythologica.fr/biblique/cain.htm
 

 


 

#5 The ballad of sexual dependency de l’artiste Nan Goldin (1982-1995)

the ballad of
Janet Stein (designer)

 

NAN GOLDIN
1953, Washington, États-Unis ― Vit à New York, États-Unis

voir à ce sujet : https://supdesub.com/index.php/cad-creation12

L'œuvre de Nan Goldin est inséparable de sa vie : marquée par le suicide de sa sœur en 1963, c'est en photographiant sa famille qu'elle entame son œuvre photographique qui, par la suite, reste très proche de l'album de famille, par sa technique comme par ses sujets. 
Série The ballad of sexual dependency
« Nous sommes liés non par le sang ou un lieu, mais par une morale semblable, le besoin de vivre une vie pleine et pour l'instant présent, une incrédulité en le futur, un respect similaire de l'honnêteté, un besoin de repousser les limites et une histoire commune. » Nan Goldin

à propos de cette œuvre constituée de plus de 800 diapositives projetées en boucle et accompagnées de chansons d’univers et d’inspirations très divers.

 

Nan and Brian in Bed, New York City 1983
Nan and Brian in Bed, New York City

Les principaux thèmes évoqués sont la fête, la drogue, la violence, le sexe, l’angoisse de la mort.

Nan Goldin n’a pas de tabou, allant même jusqu'à se photographier peu après avoir été battue par son petit ami de l’époque, ce qui avait manqué de lui faire perdre un œil. Ce fameux cliché fait partie de la série intitulée « All By Myself » qui évoque et qui atteste de son propre délabrement, physique et mental. C’est en étalant publiquement sa vie et son histoire qu’elle réussit à mieux se comprendre et à s’accepter, tout en s’identifiant dans la société.

 

Philippe H. and Suzanne Kissing at Euthanasia, New York City
Philippe H. and Suzanne Kissing at Euthanasia, New York City

Nan Goldin est confrontée au début des années 1980 à l’apparition du sida, qui décime ses amis proches et ses modèles, qu’elle considère comme sa propre famille, et qu’elle photographie de leur vie quotidienne à leur cercueil.

Nan Goldin et ses photographies forment un ensemble singulier où le spectateur se sent « aspiré » par leur monde. Archétypes communs, mémoire collective, histoires dans lesquelles il s'identifie et/ou s'interroge, la photographie de Nan Goldin renvoie le spectateur à ses propres questionnements.
 

 

trixie-on-the-cot
Trixie on the Cot, New York City

Son travail est considéré comme un miroir tendu à sa génération ou comme un répertoire désenchanté d'évènements récents de notre expérience collective ; il soulève, notamment, les problèmes de la relation entre vérité et simulation, entre prose et poésie.

Quelques Images : The Ballad of Sexual Dependency par Nan Goldin 
Et https://www.art-madrid.com/en/post/The-Ballad-of-Sexual-Dependency-great-exhibition-at-MoMA-NY 
 

 

 


 

#6 Et encore

 

 

I. FREUD

freud
Sigmund Freud

 

À partir de Freud, apparaît l’inconscient, c’est-à-dire opposé à la conscience.

Lieu caché

Inconscient proposé comme fondement du psychisme

⇒ et de la discipline de la psychanalyse

vers 1900.

Apparaît comme tel dans la psychanalyse, mais précédemment en termes d’opposition entre raison et folie.
 

Entre la maîtrise et ce qui échappe.

 

 

 

II. LEWIS CARROLL

lewis carroll
Lewis Carroll

Les aventures d’Alice au pays des merveilles, Lewis Carroll  1865

 

Lire le livre en ligne :

https://fr.wikisource.org/wiki/Alice_au_pays_des_merveilles

Pays des merveilles

logique # paradoxe

contradiction, curiosité, bizarrerie

Pays des merveilles

monde réel  #  merveilleux, ou loufoque, irréel, irréaliste

Suite De l’autre côté du miroir

Alice passe de l’autre côté du miroir, le monde à l’envers, inversé
 

 

 

Travaux étudiants