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Présentation du Laboratoire
EdJ1 - ÉCONOMIE DE LA JUSTICE 1
[ TEXTE, VIDEO // 06 minutes ]
CONTEXTE :
Au 1er avril 2024, plus d’un quart de million de personnes sont sous main de justice, 94 643 sont privées de liberté, parmi elles 77 500 sont retenues en cellules, pour 61 570 places de prisons opérationnelles en France, championne d’Europe de l’incarcération. La densité carcérale globale est de 126%. Pour les lieux d’emprisonnements préventifs (l’enfermement sans jugement pénalise 20 438 personnes) et pour ceux des courtes peines, la densité grimpe à 150% ; elle atteint 200% dans 17 établissements ou quartiers. Tous ces chiffres sont en augmentation constante depuis les années 1980.
La réponse principale de l’État à la surpopulation carcérale est la planification de 15 000 places supplémentaires d’ici 2027. Considérant le taux actuel d’incarcérations nouvelles et l’augmentation constante du rapport, il est ainsi planifié que la surpopulation perdure. Une alternative forte à l’emprisonnement tarde à apparaître dans ce pays d’Europe où le nombre de suicides est le plus élevé. La réponse principale à l’infraction reste et promet de rester la peine et la douleur, la punition, la privation de liberté et dans des conditions mortifères.
Dans un pays où la population vieillit, on enferme beaucoup la jeunesse. La moitié des détenus ont moins de 33 ans et plus d’1 sur 5 a moins de 25 ans. La longueur des peines a considérablement augmenté, selon les enquêtes approfondies du sociologue Thierry Fassin :
“La distribution de la punition est extrêmement inégale, en France comme dans beaucoup d’autres pays. Elle affecte plus particulièrement les milieux populaires et les minorités ethno-raciales – 77% des personnes en prison (les trois quarts) sont issues de ces minorités ethno-raciales ; la moitié des personnes qui sont en maison d’arrêt se déclarent sans profession, il y a un quart d’ouvriers et seulement 1% de cadres. Cela non pas parce que ces populations modestes et défavorisées seraient plus délinquantes, plus criminelles, mais parce qu’on choisit de punir certains délits – et on les punit avec une sévérité plus grande – en fonction de qui sont les milieux concernés. Par exemple, on va se montrer de plus en plus sévère pour l’usage et la détention de petites quantités de cannabis et de moins en moins sévère pour la délinquance économique et financière.”
Les prisons ne se remplissent pas seules, d’elles-mêmes. La prison n’est que l’ultime dent d’une fourche qui en comporte quatre ; la première est législative, c’est la fabrique des lois, l’invention de nouveaux interdits et le catalogue des peines réservées aux contrevenant·e·s, la seconde est policière qui sélectionne qui présenter devant un procureur, partie de la troisième dent de l’outil pénal : l’appareil de jugement.
C’est cet ensemble qu’il s’agit pour les membres étudiants et étudiantes du laboratoire EdJ1 d’étudier et de comprendre en tant qu’ensemble et dans ses interactions, avec l’intention de rechercher une voie participative pour un changement ou transformation de la perception de la justice et de la gestion des conflits.
PROBLÉMATIQUES :
la part de la population incarcérée qui constitue un danger potentiellement important pour autrui à l’extérieur de la prison est estimée à +/- 3%. Considérant la faiblesse de ce chiffre, quel autre système général concevoir ?
questionnements sur la mise en pratique des théories classiques de la justice ;
le coût annuel d’une personne en rétention en 2024 est de 33 000 euros. Avec 77 766 prisonniers en mars 2024, la dépense globale est donc de + de 2,5 milliards. Les personnes sortent le plus souvent de rétention traumatisées, déstructurées, humiliées et en colère ; de fait, elles continueront de peser économiquement sur la collectivité après la peine. Étant donnée l'importance de l’argument et facteur économique dans notre société, quoi proposer de bien moins lourd économiquement ?
questionnement sur la mise en pratique des théories classiques de la justice et recherche autour d’une mécanique inégale du jugement et d’une ethnographie de la peine et des prisons ;
recherche sur les alternatives (Pays-Bas, Allemagne, Autriche…) ;
quelles connaissances indispensables pour savoir assurer sa défense de personne civile et morale ?
OBJECTIFS :
savoir réaliser une enquête, recueillir des données et les interpréter ;
être au fait des rouages juridiques ;
accéder à une compréhension du système judiciaire, pénal, civil et carcéral ;
comprendre le système pénal pour le déconstruire (législateur-police-juge-prison) ;
replacer les institutions et leur fonctionnement dans une perspective historique et géographique large ;
connaître les différences pertinentes dans nos sociétés entre droit naturel et droit positif.
Jackson a Change - We Faw Down - LFKs 2012 - Prison de San Quentin / USA