Le VSFWNR #4 - Un truc que j’ai fait a été tourné tôt le matin du 16 septembre 2019, c’était un jour de grand beau temps.
On remontait la route qui mène à la forêt de cèdres algériens, plantée en 1861 dans la partie occidentale du massif du Petit Luberon. Quelques kilomètres au-dessus de Bonnieux, à 700 m d'altitude à peu près, de chaque côté de la route un paysage est apparu, en contrebas. Il s’est enfoncé de plus en plus et, en même temps qu’il s’enfonçait, il grandissait. La lumière grandissait avec lui. Elle devenait moins douce. Pas moins douce, juste moins proche. Comme si elle prenait de l’élan pour revenir nous écraser un peu plus tard. En attendant, c’était beau, et impressionnant. Aussi impressionnant qu’une éclipse mais sans éclipse, sans rien d’exceptionnel, juste du quotidien porté au sommet de sa qualité, juste un de ces moments comme on en connaît tous, ces moments où c’est votre vie même qui vous paraît exceptionnelle. Parce que c’est de ça qu’on parle quand on dit qu’un paysage est beau. Parce que le paysage n’est pas beau en lui-même, non ? Le paysage, il est naturel, ou culturel, il est sauvage, ou économique, mais beau… comment beau !? Le paysage, c’est un miroir du temps, et ce que l’on aime dans un paysage, c’est un moment où la vie elle-même se reflète et nous impressionne.
Alors voilà, à un moment, notre convoi s’est arrêté, et on s’est installés, sur la pente sud de la crête, pour y tourner quelque chose. Il était 7:10. C’était le premier jour de tournage, pour nous tous. Les cartes caméra et les disques étaient encore vides, et voilà comment nous avons commencé : en nous arrêtant à l’improviste, en nous confiant au hasard, sur un lieu imprévu, attirés par sa qualité et pour le plaisir d’y vivre quelques heures.
On était cinq à s’être portés volontaires pour ce premier jour. Cinq individus, on ne se connaissait pas bien. Maly, Nathy, Chris, Cookie, Nadjib, on était arrivés la veille au château de Buoux, notre QG pour la semaine. La première soirée avait mangé la nuit ; la découverte des unes et des autres, ceux avec qui on allait passer un an et quelques, les premiers échanges, la première fête.
Alors, à 7:10, c’est pas qu’on était devenus moins volontaires, mais on est restés un peu à dormir dans les camions pendant que l’équipe de tournage déchargeait le matériel et l’assemblait. Une fois la régie installée, le télépilote du drone-caméra, Franck, nous a réveillés doucement pour un café-croissant.
Maly et moi, on avait reçu les dialogues sur nos téléphones. C’était des répliques plutôt brèves, d’après Les Moissons du ciel de Terrence Malick – encore lui ?! Un petit échange très simple qu’ils ont appris rapidement. Il y était question de “cigarette”, alors j’ai préparé moi-même mon accessoire. Tout était calme et silencieux.
Ça a commencé par une série de plongées sur le corps et le masque d’endormissement de Maly ; Maly allongée dans la garrigue, à même le sol, belle et forte comme elle est. On aurait dit un casting pour une pub sur Rimbaud.
Remerciements
Mairie de Bonnieux
Parc naturel régional du Luberon
Office National des Forêts (84)
Éric Garnier