Compendium
Histoire du rap
Une histoire du rap US
DE LA SOUL – 3 Feet High and Rising - 1989
[TEXTE - VIDÉO] [2 minutes]
Les albums qui ont changé le rap
De la Soul – 3 Feet High and Rising (1989)
Posdnous, Maseo and Trugoy The Dove (De La Soul), Harlem, 1993 © David Corio
A la fin des 80′s, alors que le gangsta rap fait rage et que les esthétiques hardcore infusent tout le hip-hop, De La Soul se place à contre-courant, fleurs et couleurs vives dehors, positivité et malice en étendard. Sous la houlette du producteur Prince Paul, les trois rappeurs Trugoy The Dove, Posdnuos et Maseo publient leur premier album et se font rapidement qualifier de « hippies » par une presse rock désireuse de classer les autres musiques selon ses propres critères. Pourtant, il serait insultant de les réduire à cette expression. 3 Feet High and Rising recèle un savoir-faire technique rare, une maîtrise du sampling et du collage audible sur des classiques tels que Me Myself and I, Say No Go ou Potholes in My Lawn.
3 Feet High and Rising
De La Soul
Parution chez AOI Records le 3 mars 2023
Hip-Hop/Rap - 22 Titres - 01h 01m 25s
Il y avait des disques hip-hop comiques avant le premier album de De La Soul. Il y avait des rythmes qui repoussaient les limites non seulement de ce que la technologie d'échantillonnage pouvait faire, mais aussi de la provenance de ces échantillons et de la manière dont ils s'opposaient les uns aux autres. Il y avait des paroliers qui s'éloignaient tellement des schémas de rimes ABAB du rap de base que cela faisait exploser le potentiel de nouveaux flux et de nouvelles structures. Et il y avait des excentriques – des artistes qui ne semblaient adhérer à aucune formule hip-hop existante en termes de style, de perspective ou d’attitude parce qu’ils ne pouvaient être personne d’autre qu’eux-mêmes. Mais 3 Feet High et Rising ont fait toutes ces choses à un degré si surprenant pour un premier album que son barrage d'idées audacieusement nouvelles et uniques a planté un drapeau que personne n'a été capable de déraciner complètement.
Les rappeurs Posdnuos et Trugoy, le DJ/coproducteur Maseo et le beatmaker Prince Paul ont réalisé un travail qui aurait pu laisser plus de gens se gratter la tête avec perplexité s'il n'avait pas également solidifié l'attrait de la souche bohème émergente du hip-hop. C'est peut-être parce qu'on s'appuie autant sur des détournements de musique pop référentielle familiers mais transformateurs (Steely Dan sur "Eye Know"; Hall & Oates sur "Say No Go") que sur le genre de bêtise sublime de creuseur de caisses qui donne une joie caricaturale aux coupes. comme le "Plug Tunin' (Last Chance to Comprehend)" aux genoux tremblants qui nage la tête ou le doux mélange soul-jazz des premiers membres de l'équipe Native Tongues "Buddy". Même les interstitiels conviennent, aussi étranges soient-ils - des sketches loufoques sur les odeurs corporelles ("A Little Bit of Soap") et la mode dépassée ("Take It Off") s'ajoutent à leur approche juste du rap sur n'importe quoi qui agit à la fois un défi artistique relevé et un peu de décontraction décontractée.
De La Soul prendrait grand soin de contrôler et de définir sa propre image aux multiples facettes, culminant avec le single à succès "Me Myself and I", qui déclare leur attitude défensive face au fait d'être perçus comme des poseurs artificiels de la mode hippie tout en faisant également un clin d'œil à une idée clairement idiote et pourtant- profond précédent musical chez Funkadelic. Mais il suffit de quelques écoutes attentives de 3 Feet High et Rising – et de la complexité lyrique et de la narration dans des coupes profondes comme l’analyse empathique de la lutte sociale « Ghetto Thang » et le « Tread Water » qui reste posi fable – pour réaliser ils seraient impossibles à cerner pour le reste de leur carrière. © Nate Patrin/Qobuz